Comment mieux travailler ensemble ?

Alice Novazzi
5 min readOct 29, 2021

3 pratiques collaboratives que je retiens de La Conf’ School of Product 2021

Le 21 septembre, j’ai participé à La Conf’ School of Product, un événement sur le Product Management organisé en présentiel par BENEXT, cabinet de conseil où je suis consultante.

Après deux ans de pandémie, j’ai beaucoup apprécié participer aux conférences d’orateurs en chair et en os et échanger avec les participants autour d’un café non virtuel !

Peut-être est-ce l’influence de cet aspect social, mais ce que je retiens de la School of Product est lié au côté relationnel de nos métiers dans le Produit : je vous partage ici trois pratiques collaboratives que j’ai trouvées intéressantes pour mieux travailler ensemble.

tableau Enfants dans la mer, Joaquin Sorolla
Comment travailler main dans la main ? Enfants dans la mer, Joaquin Sorolla

1. Binômer pour détecter nos biais

Du talk d’Alexandra Lung, VP Product de Signaturit, je retiens qu’il est indispensable qu’autrui apporte un regard extérieur pour prendre conscience de ses propres biais. Pour mener des entretiens utilisateurs, rien de tel qu’un binôme : une personne pour mener l’entretien, une autre (voire deux) en observation silencieuse. L’observateur, concentré sur l’échange, avec un regard externe, pourra davantage être attentif aux éventuels biais que la personne qui mène l’entretien.

J’aime beaucoup le shadowing lorsque je facilite des ateliers (j’en parlais dans ce REX), surtout pour avoir du feedback sur ma posture et dans le cadre d’ateliers.

Ce talk me fait prendre conscience que je peux élargir cette pratique à d’autres types d’échanges. Je le fais en atelier, peut-être pourrais-je le faire davantage quand je fais passer des entretiens d’embauche chez BENEXT, ou lors d’entretiens utilisateurs.

Je retiens aussi du talk d’Alexandra que le but de l’observation est de déceler des biais, ce sera désormais un point d’attention lorsque je serai observatrice ou lorsque je demanderai du feedback à quelqu’un qui m’aura observée.

Le replay d ’Alexandra Lung

Le Bon Coin — Comment garder l’alignement et préserver le time to market lorsque l’organisation grossit ?

Passons maintenant aux deux pratiques collaboratives suivantes, tirées de l’intervention d’Hervé Lourdin, Engineering Director chez Le Bon Coin.

Voici son constat : à cinq équipes, il est facile (quoique…) de savoir ce sur quoi travaillent les autres équipes et de s’aligner. Quand on travaille à vingt équipes voire plus, cela devient compliqué ! Le Bon Coin est ainsi passé de 500 à 1400 collaborateurs entre 2017 et aujourd’hui.

Le parti pris du Bon Coin est que, puisque le code ressemble à l’organisation (c’est la loi de Conway), à l’inverse, faire des rapprochements de code permet des rapprochements organisationnels (manœuvre de Conway inversée).

Dans son talk, Hervé Lourdin a partagé plusieurs pratiques expérimentées chez Le Bon Coin. L’objectif est de développer le capital social de l’entreprise, défini comme l’avantage concurrentiel lié au fait que les personnes et équipes soient bien connectées les unes aux autres.

Aujourd’hui, grâce à l’agilité les personnes d’une même équipe sont plutôt bien connectées. En revanche, entre différentes équipes, surtout à deux extrémités différentes de l’organisation, ce capital social est à développer. Les pratiques collaboratives testées par Le Bon Coin m’ont inspirée car je pense qu’elles peuvent être adaptées et transposées dans d’autres organisations.

2. “Essaimer” : aligner le code pour rapprocher les équipes

Comment gérer un projet quand il y a des dépendances de codes entre différentes équipes ?

Dans un schéma classique, on identifie les dépendances et on en déduit un planning : l’équipe X va d’abord développer, car l’équipe Y en a besoin, puis l’équipe Z pourra faire les développements. Tout le monde s’attend, et il y a des malentendus sur ce qui est attendu par les uns et les autres, ce qui allonge le time to market et crée des tensions (“c’est la faute de l’équipe X qui était en retard”).

Chez Le Bon Coin, quand un projet impacte plusieurs équipes, on met en place du swarming (“essaimer” en anglais). On identifie l’équipe qui a la proximité fonctionnelle la plus forte avec le projet. Cette équipe devient meneuse du projet : elle est chargée d’étudier les dépendances et de produire, dans son propre code et dans celui des autres équipes. Les développeurs et développeuses de l’équipe meneuse travaillent sur le code des autres équipes en pair programming avec les membres de ces équipes. A la fin du projet, c’est l’équipe meneuse qui est responsable du code dans son ensemble, même celui produit en pair avec d’autres équipes.

Cela a un intérêt à court terme : les projets sont livrés sans obstacle (pas besoin de s’attendre) et les incohérences sont limitées puisque c’est l’équipe meneuse qui gère le projet de A à Z.

A long terme, en travaillant ensemble, les différentes équipes partagent leurs connaissances, alignent leurs pratiques et développent un lien de confiance réciproque. Puisqu’on a déjà travaillé ensemble, on se sent à l’aise pour le refaire. On connaît les membres des autres équipes, on sait qu’ils ne mordent pas et qu’ils sont même sympas, plus facile donc de collaborer ensemble à l’avenir.

Je vois clairement l’intérêt de cette pratique car je suis souvent confrontée à des projets transverses où les dépendances sont grandes entre les équipes, ce qui est source de désalignement entre les équipes.

3. Faire des “Vis ma vie”

Les “Vis ma vie” sont encore en cours d’expérimentation et d’ajustement chez Le Bon Coin : les développeurs ont la possibilité d’aller travailler dans une autre équipe, pendant deux ou trois sprints, puis de revenir dans leur équipe.

La personne invitée participe à toutes les cérémonies de la nouvelle équipe. Cela permet de confronter différentes façons de faire, pas seulement en développement mais aussi en organisation d’équipe, ce qui contribue à l’alignement et au partage de bonnes pratiques au-delà du code.

Cette pratique est plus difficile à mettre en place car elle est coûteuse pour l’équipe qui se prive d’un membre pendant un temps et cela n’est pas toujours accepté par le management.

Hervé Lourdin a évoqué les “Vis ma vie” pour les développeurs et développeuses, mais j’imagine que d’autres métiers pourraient en faire.

Le replay d’Hervé Lourdin

Un grand merci à l’équipe organisatrice de La Conf’ et aux orateurs pour cet événement qui m’a permis de prendre du recul sur mon métier, mes pratiques et celles de mon organisation.

Binômer, faire du swarming, changer d’équipe… Mon objectif dans cet article n’est pas d’inciter à faire des copier-coller de ces pratiques dans nos organisations. Je cherche plutôt à nous (moi incluse) questionner pour voir par quels petits pas nous pouvons rapprocher personnes et équipes pour qu’elles se connaissent, se fassent confiance et s’alignent vers un objectif commun.

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Alice Novazzi

Product & Agile Coach @OCTO — School of Product curator